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Lutte contre l'obésité

Publié : 25 mai 2015, 12:16
par Bubu
Le Républicain Lorrain du 22/05/2015 - Par Anthony VILLENEUVE - Photo Pierre HECKLER

Santé : Journée Européenne de l’Obésité - « La chirurgie, ce n’est pas magique ! »
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Pour soigner l’obésité, les professionnels du CHR misent sur la pluridisciplinarité. Photo Pierre HECKLER
Demain, c’est la Journée Européenne de l’Obésité. Le CHR de Metz-Thionville est très engagé sur ce terrain puisqu’il est labellisé "Centre spécialisé de l’obésité". Il mise sur la pluridisciplinarité pour traiter les patients.

La chirurgie de l’obésité, c’est pour qui ?

Ce n’est pas une chirurgie de confort, martèle le Dr Pierre Cuny, le coordinateur du centre spécialisé de l’obésité de Metz-Thionville. C’est une chirurgie destinée à traiter une pathologie grave. » Selon la Haute autorité de santé, elle s’adresse aux personnes qui souffrent d’une obésité massive, c’est-à-dire dont l’indice de masse corporelle (le poids divisé par la taille au carré) est supérieur ou égal à 40. « Mais chaque patient nécessite une appréciation particulière, observe le Dr Mathieu Hournau, chirurgien à l’hôpital Bel-Air. Nous analysons notamment les complications liées à l’obésité qui pourraient être améliorées grâce à la chirurgie : le diabète, l’hypertension… À partir de là, nous identifions des personnes à potentiel opératoire. Mais ça ne veut pas dire qu’elles seront forcément opérées… »

Que se passe-t-il avant ?

Les personnes à potentiel opératoire entrent ensuite dans un long processus préparatoire qui prendra six mois à un an. Le protocole associe des médecins, des nutritionnistes, des psychologues mais également les bénévoles de l’association BelForm, qui regroupe des anciens obèses et organise des groupes de parole. « C’est vraiment un accompagnement pluridisciplinaire, note Pierre Cuny. Chacun dans notre spécialité, nous allons prendre en charge le patient pour l’aider à adopter une meilleure hygiène de vie. »

« La chirurgie, ce n’est pas magique, résume le Dr Mathieu Hournau. Si le patient ne change pas de comportement alimentaire, ce sera un échec. » « Il faut aussi impliquer tout le cercle familial, complète la diététicienne Emmanuelle Sedki. Le plus important, c’est d’inscrire ces nouveaux comportements alimentaires dans la durée. Même opéré, si le patient continue de manger comme avant, il reprendra du poids. »
La préparation psychologique est aussi essentielle : « Il est important de comprendre les causes de l’obésité, explique Fanny Coillard, psychologue. Chez certains patients, c’est une carapace. Il ne faut jamais oublier que l’une des principales complications postopératoires de la chirurgie de l’obésité, c’est le suicide. »

« Avant l’opération, nous réunissons tous les professionnels qui suivent le patient, détaille le chirurgien. Si l’un d’entre eux émet un veto, je n’opère pas. » Les recalés ne sont pas renvoyés à la maison pour autant : comme les patients qui ne sont pas éligibles à la chirurgie, ils sont intégrés dans les programmes d’éducation thérapeutique du CHR.

Quelles sont les techniques utilisées ?

Les quatre chirurgiens du centre spécialisé de l’obésité du CHR utilisent deux modes opératoires particulièrement techniques : la gastrectomie longitudinale et le bypass gastrique. Pour la première, il s’agit de retirer jusqu’à 80 % de l’estomac. Pour la deuxième, le chirurgien crée un court-circuit gastrique. Des opérations définitives. « Elles nécessitent quatre jours d’hospitalisation et permettent un retour à une alimentation normale en un mois », détaille Mathieu Hournau. Et la fameuse technique de l’anneau gastrique ? « Nous ne la pratiquons pas au CHR car elle présente un taux d’échec sur le long terme de 80 % ».

Que se passe-t-il après ?

Les patients opérés sont suivis par le chirurgien qui les voit tous les six mois pendant les premières années. « Mais le plus important, c’est le suivi diététique à vie », note le chirurgien. « Nous invitons aussi les patients à poursuivre le suivi psychologique, précise la psychologue. Notamment en cas d’événements doulour eux. On observe souvent une dégradation de l’hygiène de vie après un coup dur. Dans ces moments, les anciens obèses ont besoin d’être aidés. »

Quels résultats ?

« Moi, j’ai perdu 55 kilos », sourit Aurélie Méry, la présidente de l’association BelForm. « Et moi 45 », annonce son vice-président. « Ça a changé ma vie, dit-elle. Mais je ne parle pas seulement de l’opération, je parle de l’hygiène de vie que ce protocole m’a permis de retrouver. Je me sens nettement mieux dans mon corps. »
« Après l’opération, un patient va forcément perdre du poids, affirme le chirurgien. Mais ce qui m’intéresse, moi, c’est le résultat à long terme. Et malgré tous les efforts que nous déployons, il y a toujours 20 % des patients qui recommencent à trop manger, arrêtent l’activité physique et reprennent donc du poids par la suite. »

Anthony VILLENEUVE
« La priorité, c’est la prévention »
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17 % des enfants de 6 à 12 ans sont en surpoids. Photo Pierre HECKLER
Le thème de la journée européenne de l’obésité, demain, c’est la lutte contre l’obésité infantile. Le centre spécialisé de l’obésité du CHR est mobilisé : « Ces dernières années, le nombre d’enfants en surpoids a été multiplié par cinq, déplore Pierre Cuny. Aujourd’hui, cela concerne 17 % des enfants de 6 à 12 ans. » Principale cause : les comportements alimentaires et la sédentarité. « Nous mettons de gros moyens dans la prévention, c’est une priorité absolue, détaille Pierre Cuny. Il faudrait, à terme, ne plus avoir recours à la chirurgie et généraliser des comportements alimentaires sains. »

« Mais c’est compliqué car nous nous battons contre des multinationales de l’agroalimentaire qui dépensent d’énormes sommes en marketing », soupire Pierre Cuny.

En attendant, le centre spécialisé de l’obésité du CHR s’associe à de nombreux programmes de prévention à destination des plus jeunes. « Il faut agir à la fois sur les enfants et sur leurs parents », note la diététicienne Emmanuelle Sedki.

Publié : 01 juin 2015, 21:37
par Bubu
Le Républicain Lorrain du 22/05/2015 - Par Anne RIMLINGER-PIGNON - Photo Marc WIRTZ

Santé : l’obésité, une vraie maladie traitée à Mercy
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L’équipe de l’association Bel Form informe les personnes souffrant d’un excès de poids et lutte contre les idées reçues et les a priori. Elle dispose d’une permanence téléphonique : 03 87 17 99 23 à Mercy et 03 82 55 80 67 à Thionville. Photo Marc WIRTZ
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Photo archives RL
Le CHR de Metz-Thionville dispose depuis 2012 d’un centre spécialisé en obésité. Ce service, multidisciplinaire, prend en charge cette maladie qui ne cesse de croître depuis quelques années. Un parcours sur le long terme.

J ’ai perdu 42 kg en neuf mois. Une véritable renaissance. Une sensation que je n’avais plus ressentie depuis mes 18 ans. » Christine Miller participe à la journée obésité organisée dans le hall de l’hôpital de Mercy. Elle représente l’association Bel Form qui l’a aidée avant, pendant et après l’opération. « J’ai suivi tout mon parcours dans ce centre spécialisé de l’obésité. J’ai trouvé une équipe médicale empathique, qui nous guide. »

Au CHR de Metz-Thionville, le Dr Pierre Cuny coordonne ce centre qui existe depuis 2012. « Ici, on traite l’obésité sévère. » Une équipe dédiée à cette problématique que Thibaut Fouquet, spécialiste de la chirurgie digestive et bariatrique, qualifie de « vrai problème de santé publique ». Les dossiers de prise en charge ne cessent de croître depuis une dizaine d’années. Les raisons varient en fonction de facteurs génétiques, environnementaux et de modifications comportementales. « Depuis une quinzaine d’années, la réduction drastique de l’activité physique chez les enfants est catastrophique », relève Pierre Cuny. C’est clair, l’avachissement devant l’écran de télévision est une catastrophe. Les régimes également.

« Je pesais 117 kg pour 1,50 m », révèle Christine. « Et moi 200 kg », reprend Miloud, qui en a perdu 100 depuis son opération programmée en novembre 2013 . Tous deux assurent avoir essayé tous les régimes. « On perd 30 kg, on en reprend 40 , analyse Isabelle Dumontier-Dequatre, diététicienne-nutritionniste. La majorité de ses patients cachent la même histoire. « Ici, on a une approche complète, face à l’alimentation et ses croyances. Il n’y a pas d’interdictions alimentaires. Il s’agit de réapprendre ses envies. »

« Je suis venue pour me faire opérer , confie Christine. Mais je ne savais pas qu’il y aurait tout un parcours médical, pourtant indispensable pour que l’opération soit un véritable succès. »

Le centre spécialisé de l’obésité traite le problème « à vie »

Psychiatres, psychologues, nutritionnistes, diététiciennes, endocrinologue, cardiologue, gastro-entérologue, la prise en charge est multidisciplinaire. « Parce que l’obésité est une porte d’entrée à bien d’autres maladies : diabète, apnées du sommeil, asthme, maladies cardiovasculaires … », explique encore Thibaut Fouquet.

L’équipe étudie les dossiers des patients. « Tous ne peuvent se faire opérer. La filière chirurgicale est encadrée par des recommandations de la Haute autorité de la santé. Nous étudions la meilleure prise en charge chirurgicale. Au CHR, nous pratiquons , en grande majorité, le Bypass gastrique ou la gastrectomie en gouttière », détaille Thibaut Fouquet.

« Attention , prévient Christine, l’opération n’est pas une baguette magique. » C’est pourquoi, le travail avec les psychologues, diététiciennes, nutritionnistes et médecins s’avère indispensable. « J’avais perdu 17 kg avant l’opération. La préparation a été longue : près d’un an », se souvient Miloud.

« On travaille sur l’image du corps, la gestion des émotions, les troubles du comportement alimentaire », insistent encore Fanny Coillard, psychologue, et Isabelle Dumontier-Dequatre.

« C’est une décision difficile », convient Christine, qui toutefois ne regrette rien. « Je n’ai plus d’hypertension, je suis en passe d’enlever mon appareil d’apnée du sommeil, je mets une taille 46 au lieu d’un 60. J’ai retrouvé la confiance en moi. » La liste est longue. Miloud reprend plaisir à faire les magasins avec ses filles « et, tous les dimanches, je marche pendant 15 km ».
Tous deux savent que le suivi avec l’équipe des professionnels de Mercy se prolongera encore longtemps. « Dans ma tête, je suis prêt », sourit Miloud.

Anne RIMLINGER-PIGNON